René Magritte - La reproduction interdite (1937)

Publié le par Sylvain Altazin (Dionys)




La Reproduction interdite est un tableau peint par René Magritte en 1937. Un homme se tient devant un miroir dont le reflet nous le présente de dos. Cette troublante infraction aux règles du portrait se trouve renforcée par le livre posé sur le rebord de ce qui semble être le foyer d’une cheminée et dont l’image réfléchie possède un caractère, quant à elle, vraisemblable.

J'ai rencontré cette oeuvre picturale pour la première fois lors d'un cours sur l'autoportrait au cinéma. En 2005 à peu près. Le professeur (dont je m'excuse d'avoir oublié le nom) l'avait convoquée car elle cristallisait l’un des enjeux essentiels de l’écriture du moi : l’impossibilité qu’a le peintre, écrivain ou cinéaste de saisir son existence de face, telle une entité finie et objectivable. L’écueil stylistique et spatio-tempore [1] confine l’auteur à ne voir qu’une image de lui, et de surcroît erronée (son regard voit ce qu’il ne peut voir : son propre dos). L’image que l’on a de soi est donc fausse et ne peut échapper à la représentation, c'est-à-dire à une forme de mise en scène. Ainsi, en associant le miroir à la toile, l’auteur entend peut-être souligner que la peinture, mais il en va de même pour le langage littéraire ou cinématographique, n’est pas le miroir de la réalité.

Quelques mois plus tard, lors de mes recherches pour un exposé à propos des jeux vidéo et de l’influence de ces derniers sur la narration cinématographique, La Reproduction interdite m’est de nouveau apparue. Charles Tesson[2] l’utilise, en effet, comme métaphore du joueur devant son avatar évoluant sur l’écran. Et d’ajouter : « Toute la question de l’image, depuis la nuit des temps, est hantée par cette obsession : y pénétrer, y marcher, afin de pouvoir fantasmatiquement et réellement la hanter de son propre corps. » Un rêve embrassé par les récits fantastiques et sciencefictionnels dans lesquels cette traversée du miroir coïncide avec une confusion entre « émetteur » et « récepteur », « jouant » et « joué ».  Un rêve (un cauchemar) embrassé notamment par Exiztenz de David Cronenberg.


[1] Telles sont les limites intrinsèques au projet autobiographique écrit : 1) la faiblesse des mots à retranscrire les sentiments (par définition non palpables, non tangibles), à laquelle vient se greffer le problème du degré zéro de l’écriture, du moins dans la littérature (toute oeuvre écrite porte la marque de préoccupations esthétiques ou stylistiques avouées ou non avouées) ; 2) les limites temporelles (écart entre le temps de l’écrivant et le temps du récit relaté que la précarité de la mémoire ne peut palier ; 3) les limites spatiales (écart entre la personne en chair et en os faite de pensées et d’actes qui écrit je, et le texte écrit, particulièrement l’objet inanimé qu’est le livre).

[3] Charles Tesson « Des souris et des hommes : le héros et son spectateur » dans Cahiers du cinéma hors-série « Jeux vidéo », septembre 2002, p. 24-27, p.27


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J
hey
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M
<br /> Bonjour<br /> <br /> <br /> j'ai lu votre article sur MAGRITTE je le trouve particuliérement intéressent,je travail dessus en se moment et j'aimerai vraiment que vous m'aidiez a approfondir mes recherches sur le maître<br /> du surréalisme ..<br /> <br /> <br /> ps: Repondez-moi sur mon email ou par commentaire le plus rapidement possible Merci <br />
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T
bonjour miriam